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Que révèle la perspective du "décentrement" sur l'expérience métropolitaine en France ?

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Les études urbaines représentent un champ disciplinaire reconnu dans les sciences sociales. Dans un contexte marqué par l’intensification des échanges à l’échelle mondiale[1], elles continuent toutefois d’ignorer la comparaison (Le Galès, 2018)[2] et de se limiter au « nationalisme méthodologique » (Detienne, 2000)[3]. D’où le choix d’une recherche ancrée dans la perspective du « décentrement », autorisant la mise à distance d’une expérience métropolitaine institutionnelle en France (Lyon) à partir de celle de Minneapolis Saint Paul (États-Unis). L’analyse comparée met en évidence pour la France la singularité du débat opposant « métropoles » et « territoires » ainsi que la pluralité des compétences acquises par l’exécutif au cours des dernières décennies. Elle précise, de fait, la pertinence du niveau métropolitain pour coconstruire la Planification écologique et solidaire.


 

Le cadre théorique de la recherche et le choix de la méthode

Depuis une dizaine d’années, des chercheurs revendiquent le principe du comparatisme en insistant notamment sur l’originalité d’un contexte où « les villes s’inscrivant dans un monde de villes »1 offrent un potentiel pour la recherche internationalisée. La géographe Jennifer Robinson estime que la réflexion théorique sur la ville et l’urbain devrait prendre en compte différentes expériences urbaines et opter pour une ouverture post-coloniale, ne différenciant plus les villes du nord et celles du sud. Ce point de vue est également défendu par Marcel Detienne qui revendique le comparatisme entre situations où les habitants ne partagent pas le même niveau de développement2. Autrement dit il s’agit de dépasser les analyses se limitant à la monographie (de Briant, 2016), à la simple circulation des modèles d’urbanisme et d’architecture ou au seul souci d’une hiérarchisation de villes, à l’image du ranking3. Les chercheurs souhaitent aller plus loin avec l’intention d’universaliser les théories urbaines (Pinson, 2018 ; Robinson, 2011) qui jusqu’ici reposent sur un nombre limité d’études de cas.

Le présent article n’a pas pour finalité de déconstruire une théorie urbaine au profit d’une autre, il démontre les avantages de la pratique du décentrement (Donzelot, 2006) qui dans ce présent article met en évidence la « singularité » de la métropole institutionnelle en France. Prendre distance revient à observer un terrain à partir d’une grille d’analyse empruntée à un autre terrain. Sur la base d’entretiens semi-directifs menés auprès d’acteurs publics à Lyon et Minneapolis Saint Paul (deux expériences perçues dans leur cadre national comme des réussites) et d’un choix en faveur de l’analyse comparée, l’exercice a pour finalité de préciser la « singularité » de l’expérience métropolitaine en France et d’enrichir le débat public concernant l’action publique territoriale. Autrement dit, il souligne la pertinence du niveau métropolitain pour œuvrer à la Planification écologique et solidaire, suite à la volonté du gouvernement.

L’option du décentrement

L’incitation au décentrement avait largement influencé l’écriture de La métropolisation en question4 (2015), un ouvrage ayant mis en évidence les similitudes et les écarts différentiels de la définition de « métropolisation » dans les corpus francophones et anglophones. Les deux corpus associent la métropolisation à la transformation de la ville sous l’influence d’amples processus d’une urbanisation généralisée d’une part et d’une mondialisation multidimensionnelle d’autre part. Les chercheurs anglo-américains mettent plus l’accent que les chercheurs francophones sur la reconfiguration spatiale urbaine associée à la restructuration économique. Ils insistent sur l’extension d’un territoire urbain incluant désormais au-delà de la ville et du suburbain, le périurbain et les territoires ruraux. Des mots ont même été inventés, comme celui d’Edge City (Garreau, 1991) et Edgeless cities (Land, 2003) pour signaler la nouvelle spatialisation d’emplois qui ne sont plus limités à la ville centre et concernent les territoires suburbains et parfois périurbains5.

Pour définir la métropolisation, les chercheurs francophones insistent sur l’impératif d’initier de nouvelles dynamiques économiques, suite à la désindustrialisation indissociable de l’internationalisation du marché du travail. L’exécutif des intercommunalités a désormais la responsabilité de générer la métropolisation au travers d’une politique d’attractivité, de grands projets urbains6 et de s’orienter vers l’économie de la connaissance (Florida, 2011 ; Veltz, 2005, 2016). Suite à la mise en perspective de deux corpus sur la thématique de la métropolisation signalant similitudes et écarts différentiels, la réflexion se poursuit à présent par une analyse comparant l’expérience de la métropole institutionnelle en France—un pays caractérisé par un État centralisé ayant opté pour une politique e décentralisation — et aux États-Unis — un État fédéral où le niveau de l’État fédéré s’affirme sans perturber l’ordre fédéral.

Pas question de privilégier un modèle par rapport à un autre mais de clarifier les fondements théoriques de cette idée d’une « fracture territoriale » entre les métropoles et la France périphérique. La recherche internationalisée d’inspiration marxiste reproche aux exécutifs métropolitains d’incarner l’idéologie néolibérale (Adam & Comby, 2020 ; Guironnet, 2022 ; Pinson & Morel Journel, 2017 ; Pinson, 2020), de privilégier les partenariats publics-privés (Healy, 2007 ; Linossier, 2006) et de fonder leurs politiques sur le principe d’une rivalité entre les métropoles à l’échelle mondiale. Mais en France, la critique va plus loin : elle oppose systématiquement les métropoles perçues comme des « vitrines de la mondialisation » aux territoires périphériques (périurbain, campagnes et petites villes) abandonnés par l’État (Guilly, 2019). Un argument équivalent avait été diffusé lors du mouvement des Gilets jaunes en 2018. La critique ignore volontairement la thèse de Laurent Davezies (2008, 2021) qui, sur la base de nombreux travaux, démontre que les métropoles participent de la politique de redistribution de l’État.

Suite à la pandémie, à la crise sanitaire et la pratique du télétravail, à l’opposition entre métropoles concentrant la richesse et les territoires périphériques abandonnés, la critique a été médiatisée par le slogan de l’« exode urbain » que de récents travaux centrés sur les mobilités résidentielles relativisent (Puca, 2022)7.

Le choix de deux expériences métropolitaines

Le choix de deux expériences s’est porté sur deux métropoles institutionnelles qualifiées d’exemplaires dans leurs pays respectifs. Il s’agit de la métropole de Lyon (ML) en France où le Conseil de la métropole est élu au suffrage universel depuis 2020 (Bacot, 2019) et de Minneapolis Saint Paul (MSP) qui, avec Portland dans l’Oregon, se distingue aux États-Unis par la politique de redistribution fiscale du Conseil métropolitain (Orfield, 1997)8. Ces deux métropoles sont comparables parce qu’elles ont des chiffres de population assez proches et qu’elles relèvent toutes les deux de la catégorie des seconds cities (Hodos, 2007). L’historien Jérôme Hodos différencie à juste titre les « villes globales » ou « villes mondes » des villes secondes tout en reprochant aux études urbaines de privilégier les villes globales9. Les deux catégories de villes s’inscrivent dans les flux de la mondialisation mais les premières se différencient des secondes en raison de leur pouvoir de commandement et d’influence sur les réseaux à l’échelle mondiale (comme Paris, Londres, New York et d’autres encore). Hodos qualifie les second cities de « villes résilientes » parce qu’elles ont connu un développement économique préindustriel, industriel et qu’elles se dotent de nouveaux moyens pour participer à l’économie mondialisée (Payre, 2013). Ce qui correspond bien aux profils des deux métropoles choisies.

La population de ML s’élève à 1,4 millions d’habitants et celle de MSP à 3 millions d’habitants (un chiffre représentant plus de la moitié des habitants de l’État du Minnesota10). Mais si l’on tient compte du territoire de l’Inter-Scot de Lyon, la population atteint 3,3 millions d’habitants, soit un chiffre équivalent11. La dimension historique de Lyon (Aubelle, 2020) n’a rien d’équivalent avec MSP : la ville a obtenu le statut de « patrimoine mondial de l’Unesco » en 1998. Et les Lyonnais rappellent régulièrement que Lyon a été capitale des Trois Gaules à l’époque romaine. Mais MSP enregistre une influence touristique presque équivalente en raison du Mall of America (le plus grand centre commercial des États-Unis au moment de son inauguration en 1992)12, de son paysage de lacs et de ses parcs naturels. MSP présente l’originalité d’inclure deux villes centres séparées par le Mississippi : Saint Paul, la capitale de l’État du Minnesota à l’est et Minneapolis la capitale économique à l’ouest.

Ce que révèlent les entretiens

Les entretiens semi-directifs à Lyon se sont échelonnés sur une période allant de 2016 à 202113. Pour ce qui concerne MSP, le travail de terrain s’est déroulé en 2017, année célébrant les 50 ans de l’institution, et a bénéficié de l’accueil de l’Institute of Metropolitan Opportunity14 de l’Université du Minnesota pour une mission d’un mois. Les entretiens se sont déroulés avec les chercheurs de l’Institut, des professionnels de l’administration métropolitaine ainsi que deux membres du Conseil métropolitain. Suite à l’expérience généralisée du télétravail, il a été possible de poursuivre les échanges avec des personnes déjà rencontrées (lors du séjour à Minneapolis Saint Paul) pour obtenir quelques précisions. Ce qui a permis de suivre l’évolution politique de la city-région.

Les similitudes : une première phase de l’intercommunalité partagée (État central et État fédéré)

Les deux métropoles partagent une histoire commune. Avant d’acquérir le titre de « métropole », Lyon a bénéficié d’une loi de 1966 en faveur de la création de l’intercommunalité pour lutter contre la fragmentation communale et instaurer un dialogue entre les communes confrontées à l’urbanisation. Lyon a obtenu le titre de « communauté urbaine » en 1969. L’État aurait en quelque sorte anticipé sur les effets négatifs d’une urbanisation galopante accentuant les inégalités sociales et spatiales, en raison de l’inégalité d’accès aux services publics (Scherrer, 1992). Mais l’intercommunalité imposée par l’État, n’a pas rencontré au départ un grand enthousiasme de la part des élus locaux qui craignaient de perdre de leurs pouvoirs au profit de la ville centre de Lyon. Il est vrai que le président de la communauté urbaine cumulait la fonction de maire de Lyon.

À MSP, l’État fédéré15 a créé l’intercommunalité de la city-région en 1967. La city-région fait référence, pour les géographes anglo-américains, à l’ampleur d’un tissu urbain non limité à une ville centre et à ses proches banlieues. Mais contrairement à Lyon, l’intercommunalité de MSP fut désignée « métropole ». Quelques années plus tard, le chercheur Myron Orfield (1997) traduira cette invention par « métropolitics » pour expliciter combien la city-région accédait au statut de « scène politique », en dépit de la désignation des membres du Conseil métropolitain et de son président par l’État fédéré. En 1967, l’État fédéré répondait aux revendications des habitants face à une urbanisation se traduisant par la rivalité entre communes et comtés pour attirer entreprises et habitants et une intervention très limitée des pouvoirs publics. Sous l’égide de la Citizens League16, les habitants se sont mobilisés pour dénoncer les inégalités sociales et spatiales liées au non-accès à des services publics de base, comme le transport et l’assainissement (Orfield, 1997).

La décision de l’État fédéré du Minnesota s’est illustrée aux États-Unis comme une rupture avec l’idéologie dominante en faveur de la Théorie des Choix publics, remarquablement illustrée par l’article phare d’Ostrom, Tiebout et Warren (1961)17 légitimant la « politique du laisser-faire ». Les trois chercheurs jugeaient la rivalité entre municipalités bénéfique et percevaient l’exercice de la planification urbaine pour assurer une cohérence territoriale de superflu. Autrement dit, ils pensaient que le marché était en mesure de s’autoréguler, sans intervention des pouvoirs publics. À Minneapolis Saint-Paul, les habitants ont sollicité l’intervention de l’État fédéré pour régler les problèmes d’assainissement, de pollution de l’eau potable et du transport en commun et ainsi assurer une offre de services urbains adéquate à la demande. Le transport en commun qui relevait d’entreprises privées a été attribué à la Métropole ainsi que les compétences liées à l’investissement public dans les infrastructures. À l’époque, il n’était pas encore question de la péréquation fiscale et de la gestion des fonds fédéraux pour le logement abordable, deux compétences que l’État fédéré ajoutera quelques années plus tard.

Si les deux expériences métropolitaines partagent une histoire commune remontant aux années 1960, elles présentent aujourd’hui de sérieuses différences en raison d’un « tournant » qui s’est opéré en France contrairement au Minnesota. L’État central a mené une politique de décentralisation et les acteurs locaux (maires et présidents de la « communauté urbaine ») ont fait preuve de volonté pour s’impliquer dans le développement économique et urbain de l’agglomération.

Les écarts différentiels : les compétences de l’exécutif

Les compétences d’une métropole sous l’égide d’un État fédéré soucieux de renforcer son pouvoir dans un contexte de New Federalism18 sont plus limitées que celles d’une métropole bénéficiant d’un contexte de décentralisation. Depuis 2020, les membres du Conseil de la métropole de Lyon sont élus au suffrage universel alors qu’il n’en est pas de même pour le Conseil métropolitain dont les membres continuent d’être désignés par le gouverneur et la Législature de l’État fédéré. Les deux conseils partagent toutefois quelques compétences communes : ils établissent les documents de planification territoriale ; gèrent et investissent dans les infrastructures comme l’approvisionnement en eau, le traitement des eaux usées et des déchets, le transport et le logement abordable et assurent la péréquation fiscale (dotation de solidarité, tax-base sharing). Mais contrairement à ML, la politique de l’attractivité ne relève pas du Conseil métropolitain de MSP. Elle revient à l’État fédéré qui œuvre avec le « Minneapolis Régional Chamber »19 et le « Greater Minneapolis » (une association de chefs d’entreprise)20. C’est ce dernier organisme qui a sollicité le programme « Build Back Better » de l’administration fédérale en 2021 pour obtenir des financements en vue de la création de nouveaux clusters (pôles de compétitivité).

La politique d’attractivité à l’échelle métropolitaine qui, à Lyon se traduit par la réalisation de grands projets urbains, comme le quartier de la gare Part-Dieu ou celui Confluences, n’a pas vraiment d’équivalent à MSP où les projets immobiliers continuent de relever de l’initiative associant promoteurs immobiliers et municipalités, dans le respect du document d’aménagement de la métropole. L’équipement majeur que représente le Mall of America, qui a inscrit la métropole dans les réseaux touristiques, relève de l’initiative du gouverneur soucieux de « to put Minneapolis Saint Paul on the map »21. La mise en œuvre de ce projet dans la municipalité de Bloomington (commune située au sud de la ville centre de Minneapolis, non loin de l’aéroport) a été gérée par les promoteurs et constructeurs. Quant à la métropole, elle avait pour mission d’obtenir l’approbation des municipalités non concernées par le projet, en réaffirmant le principe d’une politique de redistribution fiscale des recettes municipales.

Si les compétences de ML sont nettement plus étendues que celles de MSP, cette situation s’explique en grande partie par les initiatives d’une succession d’exécutifs de la communauté urbaine dotés d’une grande capacité de négociation avec l’État22. Le chercheur Christophe Parnet (2020) a remarquablement analysé et étudié le dialogue continu entre les élus locaux dotés d’un fort capital social et politique et l’exécutif de l’État. Dès 2013, Gérard Collomb entame le dialogue avec la ministre en charge de la Réforme de l’État, de la Décentralisation et de la Fonction publique, Marylise Lebranchu pour doter la métropole du statut de département et ainsi accroître ses compétences (Aubelle, 2020). La ministre n’a pas d’objection mais elle exige de Gérard Collomb d’obtenir l’accord préalable du président du département du Rhône, Michel Mercier, qui est par ailleurs son confère au Sénat. Dès la fin de cette même année, Collomb et Mercier rencontrent le président de la République lors de son passage dans la ville et annoncent leur décision commune lors d’une réunion à la presse. Leurs conseillers et les habitants l’apprennent à ce moment-là (Parnet, 2020). Les deux sénateurs, sont en mesure de suivre et d’encadrer la fabrication de la loi Maptam (loi de Modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles), tout au long du processus institutionnel.

Votée en 2014, la loi dote l’agglomération de Lyon d’un statut de département, désigne l’intercommunalité de « métropole » et l’autorise à se doter d’un conseil métropolitain élu au suffrage universel (Bacot, 2019). Elle représente ainsi un tournant dans la trajectoire de l’intercommunalité à Lyon, ce qui contraste avec la stabilité dans laquelle œuvre le conseil métropolitain de MSP, désigné par l’État fédéré. Les critiques à l’égard d’un Conseil métropolitain désigné plutôt qu’élu se manifestent régulièrement à MSP mais le gouverneur y répond en désignant une commission chargée de l’évaluation du fonctionnement de la Métropole. Les rapports d’évaluation indiquent combien les services publics qu’elle gère répondent à la demande des habitants23.

La singularité de la Métropole en France : son expérience politique

Décentrer l’expérience métropolitaine française à partir de l’étude de cas de la Métropole du Grand Lyon revient à identifier la singularité de la métropole made in France dont le pouvoir politique n’a cessé de s’accroître au cours des dernières décennies. La métropole institutionnelle observée dans le Minnesota n’a pas modifié l’ordre fédéral contrairement à celle qui, en France, a renversé l’image traditionnelle d’un territoire organisé suivant le principe de l’« égalité » (Estèbe, 2015). Aussi, elle n’a pas suscité des mobilisations sociales équivalentes à ce qui peut s’observer en France, comme le relatent les articles du dossier de la revue Métropoles intitulé « Contester la métropole »24. L’image de la métropole vient perturber les représentations traditionnelles d’un territoire uniforme relevant de l’autorité d’un État centralisé (Caillosse, 2010). La politique de l’attractivité de la métropole est critiquée en France au même titre que la théorie du ruissellement sur laquelle elle s’appuie 25 par des chercheurs revendiquant le potentiel de la créativité au niveau du territoire national.

L’expérience métropolitaine en France à partir d’un regard décentré sur la Métropole de Lyon souligne la richesse de l’expérience politique de l’Intercommunalité depuis les années 1960 et l’éventail des compétences acquises par l’exécutif. Ce qui ne se vérifie pas au niveau du Conseil métropolitain de Minneapolis Saint Paul œuvrant sous l’autorité de l’État fédéré. Le choix du décentrement ne se limite pas à mettre en évidence ressemblances et écarts différentiels entre deux expériences métropolitaines, il contribue au débat public relatif à l’action publique territoriale. À l’heure où l’État s’engage dans la Planification écologique et solidaire, l’analyse comparée autorise à confirmer la pertinence du niveau métropolitain pour co-construire la décarbonation de l’économie et des modes de vie. Autrement dit, la conception et la mise en œuvre d’une Planification écologique et solidaire ne peuvent se passer de l’intervention explicite des métropoles, compte tenu de la richesse de leur expérience politique au cours des dernières décennies et leurs capacités à gérer leur territoire sur le mode transversal (l’économique, le social et l’environnemental). Cet apparent plaidoyer en faveur des Métropoles, exige toutefois deux conditions. Il revient à la Métropole d’assumer un dialogue relationnel avec les territoires adjacents (situés en dehors de son périmètre) et d’inventer les modalités d’une gouvernance s’appuyant sur la dynamique d’une démocratie participative.

Bibliographie 

Adam, M. & Comby, E. (dir.) (2020), Le Capital dans la cité : une encyclopédie critique de la ville, Paris, Amsterdam.

Aubelle, V. (2020), N’est pas métropole qui veut ou le trompe-l’œil lyonnais, Fondation Jean Jaurès. URL : https://www.jean-jaures.org/publication/nest-pas-metropole-qui-veut-ou-le-trompe-loeil-lyonnais/

Bacot, P. (2019), La métropole de Lyon et les élections métropolitaines, Paris, éditions CRPS.

Caillosse, J. (2010), « La métropole impossible : l’identité juridique de la ville », Pouvoirs locaux, vol. 86, N° III, pp. 41-50.

Davezies, L. (2020), L’État a toujours soutenu ses territoires, Paris, Seuil.

de Briant, V. (2016), « Governance always multilevel. The case of metropolitan governmental areas in France and in Italy », Studia Europaea, vol. 61, no. 1.

Detienne, M. (2000), Comparer l’incomparable, Paris, Seuil.

Estèbe, Ph., (2015), L’égalité des territoires. Une passion française, Paris, PUF, collection « la ville en débat ».

Ghorra-Gobin, C. (2015), La métropolisation en question, Paris, PUF collection « la ville en débat ».

Guironnet, A. (2022), Au marché des métropoles. En quête sur le pouvoir urbain de la finance, édition, les étaques.

Guilluy, Ch. (2019), Fractures françaises, Paris, Flammarion.

Healy, A. (2007), Le gouvernement privé de l’action publique urbaine. Sociologie politique de la « gouvernance métropolitaine » du Grand Lyon (fin du XXe siècle), Thèse de science politique, Institut d'études politiques de Lyon, Lyon.

Hodos, J. (2007), Globalization and the Concept of the Second City », City & Community, Vol.6 N°4, pp.315-333. URL : https://doi.org/10.1111/j.1540-6040.2007.00230.x

Lang, R. E. (2003), Edgeless Cities. Exploring the Ellusive Metropolis, Washington DC, Brookings Institution.

Lemouzy, L. (2021), « Le territoire, cette scène où l’Etat se représente », Pouvoirs Locaux 119, p. 5-8.

Notes de bas de page

  • 1 Cette expression se veut la traduction française du titre de l’article de Jennifer Robinson, « Cities in a world of cities : the comparative gesture » publié dans l’International Journal of Urban and Regional Research N° 351, 2011, p. 1-23.

  • 2 Compte tenu de l’ampleur de la tâche que requiert le comparatisme en anthropologie, Marcel Detienne défend à juste titre, le recours à des recherches collectives.

  • 3 De nombreux travaux ayant pour finalité le principe du ranking ont été entrepris par des universitaires : Quelles métropoles en Europe ? Des villes en réseau par Ludovic Halbert, Patricia Cicille,
    Céline Rozenblat, coll. Travaux n°16, DATAR, La Documentation française, novembre 2012.

  • 4 La rédaction de l’ouvrage a eu lieu en 2014, l’année de la promulgation de la loi Maptam (s’adressant à une douzaine de grandes intercommunalités) qui a précédé la généralisation du terme « métropole » pour d’autres catégories d’intercommunalités (loi NOTRe en 2015).  

  • 5 Ce qui a bien entendu pour effet d’accroître l’usage de la voiture et le nombre de kilomètres parcourus par la voiture.

  • 6 Ces projets urbains présentent le sérieux inconvénient d’entraîner la « gentrification », c’est-à-dire de l’exclusion des classes populaires et classes moyennes, comme l’ont démontré de nombreux chercheurs.

  • 7 Puca, « Exode urbain ? Petits flux, Grands effets », 2022 . URL : http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/exode-urbain-realisation-d-une-etude-sur-les-a2388.html

  • 8 Dans cet article, le « Conseil de la métropole » fait référence à Lyon alors que le « Conseil métropolitain » (traduction de Metropolitan Council) fait référence à Minneapolis Saint Paul.

  • 9 A la suite de l’ouvrage de Saskia Sassen en 1991, les chercheurs ont surtout privilégié l’étude des « villes globales ».

  • 10 Bien que situés dans le Midwest, les habitants du Minnesota n’ont pas voté pour le président Trump en 2016 et en 2020.

  • 11 Voir le site de l’Interscot de l’aire urbaine Lyon -Saint Etienne. URL :https://www.inter-scot.fr/

  • 12 Voir l’article de Cynthia Ghorra-Gobin (2002) « Inscription territoriale d’un équipement régionale et légitimité politique à l’échelle de la région urbaine : le cas du Mall of America », Flux N°4, pp.44 à 52. URL : https://www.cairn.info/revue-flux1-2002-4-page-44.htm

  • 13 L’auteur de l’article remercie tous ceux qui ont accepté de partager leurs connaissances sur l’expérience métropolitaine de Lyon. A la Métropole de Lyon, Bernard Lensel a facilité la prise de contact avec les professionnels ; A l’Agence d’urbanisme de Lyon, Pascale Simard qui à l’Agence d’urbanisme de Lyon a permis de rencontrer de nombreux interlocuteurs ; Jean Frébault a facilité la prise de contact avec Sébastien Chambe et le préfet Jean-François Carenco ; Eric Verdeil a suggéré la rencontre avec Renaud Payre à l’époque où il était directeur de Sciences Po-Lyon. Le travail de terrain s’est également appuyé sur les travaux de chercheurs, dont la plupart figurent dans la bibliographie.  

  • 14 L’auteur remercie le directeur de l’Institut, Myron Orfield — -rencontré en 1996, lors d’une première mission dans cette métropole — ainsi que Thomas Luce qui lui ont facilité l’accès aux agents et conseillers de la métropole. Les missions sur les terrains de ML et MSP ont bénéficié du financement du CREDA, Centre de recherches et de documentation des Amériques, de l’Université de Sorbonne Nouvelle.

  • 15 Aux États-Unis, les communes et les comtés relèvent du niveau fédéré et non de l’État fédéral. Aussi il est peu aisé de se rendre compte du mouvement en faveur de la métropole institutionnelle aux Etats-Unis en dehors de références sur chacun des 50 États fédérés.

  • 16 Citizens League est une association civique et non partisane. Créée en 1952, elle continue de représenter un rouage politique indispensable au niveau de la métropole. URL : https://citizensleague.org/

  • 17 Ostrom V., Tiebout C.M. & Warren R. (1961), « The organization of government in metropolitan areas : a theoretical inquiry », The American Political Science Review , Vol. 55, No. 4, pp. 831-842.

  • 18 Cette expression a été inventée par les politistes américains dans les années 1980 lorsque le président Ronald Reagan a choisi de donner plus de pouvoirs aux États fédérés.

  • 19 Consulter le site de Minneapolis Regional Chamber. URL : < https://www.mplschamber.com/about-us/>

  • 20 Consulter le site de Greater Minneapolis. URL : https://www.greatermsp.org/

  • 21 Voir l’article de Cynthia Ghorra-Gobin (2002) dans Flux. URL : < URL : https://www.cairn.info/revue-flux1-2002-4-page-44.htm

  • 22 Lors des entretiens à Lyon, les interlocuteurs rappelaient toujours la figure du maire et président de la communauté urbaine Michel Noir, qui lors de son élection en 1989, a souhaité modifier la trajectoire de la communauté urbaine. La période était marquée par les lois de décentralisation des années 1982 et 1983. Cette ambition de faire de Lyon, une ville européenne, fut tout autant partagée par ses successeurs, Raymond Barre et Gérard Collomb.  

  • 23 Voir le rapport de la Commission (Blue Ribbon Panel) sur le Conseil métropolitain en 2020. URL : https://www.house.leg.state.mn.us/comm/docs/YDxwOlaHLEe9MnP_rHNQtw.pdf

  • 24 Consulter le numéro 28 de la revue en ligne Métropoles dont le dossier est centré sur la contestation. URL : < https://journals.openedition.org/metropoles/7769>

  • 25 Voir l’article d’Olivier Bouba-Olga et de Michel Grossetti dans l’Information géographique N° 2 de l’année 2019, « Le récit métropolitain, une légende urbaine ». URL :< https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2019-2.htm>