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L'encadrement du lobbying local par la loi Sapin 2

Une politique symbolique aux effets concrets

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Si la loi encadre désormais le lobbying local, elle ne semble pas en mesure d’assurer la traçabilité des décisions publiques qu’elle revendique. L’encadrement du lobbying local ressemble donc à une « politique symbolique », dont l’une des particularités est de produire des effets plus ou moins contrôlés, et donc plus ou moins heureux, sur les représentations. Maladroitement déployé, ce dispositif pourrait générer une perte de confiance à l’encontre des institutions et décisions publiques locales.

Un régime de déclarations obligatoires

Dotées de toujours plus de compétences, de budget et de visibilité, les collectivités sont l’objet d’un lobbying de plus en plus intense et structuré pour influencer leurs décisions1. Il aura toutefois fallu attendre 5 ans pour que les règles imposées à l’échelon national aux représentants d’intérêts depuis la loi Sapin 2 s’appliquent également au lobbying territorial, non sans peine. L’application décalée pour les décisions locales était prévue par la loi mais elle a en plus été reportée à deux reprises. En 2018, l’extension du dispositif national aux collectivités a même failli être abandonnée via un amendement à un projet de loi ; certains parlementaires craignant de faire peser des obligations déclaratives disproportionnées sur des petites entreprises et sur des associations locales sollicitant des subventions ou des autorisations.

Dans son rapport sur le système existant, le parlementaire Sylvain Waserman, Président de la délégation chargée des représentants d’intérêts et des groupes d’études, préconisait lui aussi l’abandon de l’élargissement des règles « Sapin 2 » aux collectivités2. La Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP), en charge de la mise en œuvre de la réglementation, n’a elle-même jamais caché ses réticences envers cette extension, craignant pour la lisibilité et l’efficacité de son action face à la masse de données à traiter si elle devait également traiter des décisions publiques locales.

Toujours est-il que depuis le 1er juillet 2022, les règles de la loi Sapin 2 destinées à encadrer le lobbying ont été étendues au local3. Comme ils le faisaient à propos de leurs interactions avec les décideurs rattachés à l’Exécutif et au Parlement, désormais les représentants d’intérêt sont également tenus de déclarer leurs actions menées auprès de certains décideurs publics chargés de mission de nature administrative à l’échelle locale, tels que : les directeurs des services des régions et des départements ; les directeurs généraux et directeurs des services de certaines villes, EPCI et syndicats mixtes ; certains directeurs de services déconcentrés de l’État ; les directeurs d’établissement public hospitalier dont le budget est supérieur à 200 millions d’euros ; etc. Doivent aussi être déclarées les actions entreprises auprès des décideurs publics chargés de mission de nature politique locales, tels que : les présidents de conseil régional ; les conseillers régionaux titulaires d’une délégation de fonction ou de signature ; les directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinet du président du conseil régional ; même chose dans les départements ; idem encore pour les maires et les équivalents fonctionnels des postes cités précédemment dans certaines communes et EPCI à fiscalité propre ; etc.

Le principe est que toute communication avec un responsable public, si elle est à l’initiative du représentant d’intérêt, doit être considérée comme ayant pour objectif d’influer sur cette décision et donc constitue une action de lobbying. Concrètement cela inclut, entre autres, les réunions formelles, les correspondances écrites, les appels téléphoniques, les discussions informelles, la transmission d’expertises, etc. Ce sont ces actions, leur objet, leur cible et les moyens consacrés qui doivent être déclarés à la HATVP qui les enregistre sur un répertoire dédié qu’elle rend accessible au public sur internet. Enfin, sans entrer dans le détail, ceux qui doivent effectuer cette déclaration, sous peine de prison et d’amende, sont tout individu ou structure qui exerce ce type d’activités à titre régulier. La loi considère donc que sont des représentants d’intérêt, notamment les entreprises, les cabinets de conseil, les fédérations professionnelles, les groupements d’intérêt public, les associations, les chambres de commerce ou encore les chambres d’agriculture. Ne sont formellement exclus du champ d’application de la loi que les élus et leurs associations représentatives, les syndicats d’employés et d’employeurs, les associations cultuelles et les partis politiques.

Une transparence en clair-obscur

L’encadrement du lobbying en France a beau être l’un des plus précis, il est souvent comparé à une raquette pour ses trous dans sa capacité à identifier l’impact des représentants d’intérêt sur les décisions. On retrouve ces failles à l’échelon local, qui en ajoute d’autres.

Un encadrement centré sur la face émergée
du lobbying

Qu’apprennent les étudiants dans les masters de lobbying et de plaidoyer ? Certainement pas uniquement à prendre rendez-vous avec les acteurs de la décision publique. En réalité le contact direct avec le décideur ne représente qu’une part congrue de l’activité du représentant d’intérêt, mais la plus romancée. L’essentiel du travail des représentants d’intérêt consiste à effectuer des veilles, réaliser des cartographies, construire des argumentaires et livrer des notes d’analyse et de stratégie. Aucune de ces actions ne doit faire l’objet de déclaration. Surtout, tous les étudiants apprennent que contacter un décideur au sujet d’un texte en projet ou, pire, d’ores et déjà soumis à son examen est déjà une forme d’échec. Le bon lobbyiste est celui qui anticipe, celui qui identifie les signaux faibles, celui qui n’a pas à faire déposer d’amendements et qui donc intervient avant même un projet de texte. La raison maintes fois expliquée par la science politique tient aux effets de verrouillage des décisions et annonces publiques4. Cette empreinte normative ante-texte sort du spectre de la loi Sapin 2.

De même, très souvent une représentation efficace des intérêts ne consiste pas à influencer les décideurs mais à convaincre ceux qui fabriquent la décision. Là aussi les lobbyistes connaissent les fondamentaux de la sociologie et de la science politique et savent que les « grands » élus sont accaparés par leurs tâches de représentation. Ils actent, tranchent éventuellement, mais instruisent rarement les dossiers. Les autres « grands » décideurs qui les appuient dans les services et les cabinets sont eux accaparés par des tâches de nature politique et de management. Ceux qui vont déterminer les détails des décisions publiques, donc la portée de celles-ci, sont les agents de bureau ou, en aval, ceux de terrain. Hors la loi ne porte que sur les interactions avec les grands chefs (maires, président de conseil régional, directeur général, directeur de service, directeur et chef de cabinet…).

Enfin, un lobbyiste accompli sera celui qui sera identifié par les décideurs, que ce soit comme contrainte ou comme ressource. À terme, sa capacité à fournir de l’expertise, à incarner un enjeu, à rassembler ses adhérents, son savoir-faire stratégique feront de lui un interlocuteur institutionnalisé pour les décideurs. La multiplication des interactions à travers le temps les naturalisent. Si bien que le représentant d’intérêt n’aura plus à contacter le décideur mais c’est celui-ci qui le fera. Or la loi n’encadre que les communications à l’initiative du représentant d’intérêt. Pas plus qu’elle n’encadre la zone grise de la sociabilité professionnelle qui a débouché sur des relations plus personnelles. À l’instar des journalistes spécialisés, les lobbyistes font partie du champ politique, ils participent à des dîners, barbecues, baptêmes où ils côtoient amicalement les décideurs mais des discussions professionnelles prennent nécessairement place dans ces cadres privés.

Toutes ces limites valent autant pour l’échelon local que national mais au local les failles sont encore plus béantes car la loi fixe des seuils pour déterminer les interactions qui sont concernées. En particulier, elles reposent sur des seuils de population. Par exemple, pour les déclarations des interactions avec les décideurs publics chargés de missions de nature politique, seuls sont concernés les échanges avec les décideurs des communes et EPCI de plus de 100 000 habitants ; pour les décideurs publics chargés de missions de nature administrative, ne sont concernés que les décideurs des communes et EPCI de plus de 150 000 habitants. En 2022, sur les 1 254 EPCI à fiscalité propre, 28 % regroupaient moins de 15 000 habitants, 35 % regroupaient entre 15 000 et 30 000 habitants et seulement 10 % plus de 100 000 habitants. En 2021, seules 0,1 % des communes possédaient plus 100 000 habitants.

L’encadrement du lobbying local ne concerne donc qu’une infime partie des collectivités et EPCI. Or les politiques de mobilité, d’énergie, d’urbanisme et autres secteurs aux lourds enjeux réglementaires et économiques ne regardent pas que les zones plus peuplées. La représentation des intérêts s’exerce autant, et parfois plus, dans des territoires de modeste envergure. Par exemple, le secteur des énergies renouvelables est l’objet d’un lobbying intense vu les oppositions systématiques d’une partie des habitants, la concurrence commerciale entre constructeurs, les montants en jeu et la place centrale des décisions publiques dans les autorisations d’implantation. Dans ce domaine l’État joue un rôle clef dans la décision via ses services déconcentrés mais les collectivités et EPCI également. Même quand leur poids dans la décision n’est que consultatif on imagine mal la construction d’un champ éolien sur un territoire sans le soutien des collectivités. Le plus grand parc éolien de France se situe sur le territoire de la communauté de communes du Haut-pays du Montreuillois. Un peu plus de 16 000 habitants y vivent, bien en deçà des seuils d’application de la loi Sapin 2. À l’inverse fort peu de parcs éoliens ou photovoltaïques sont installés au cœur des métropoles de Rennes ou de Bordeaux qui sont elles concernées par les règles inscrites dans la loi.

Un encadrement du lobbying
mais pas de l’influence

La littérature académique, la sphère politique et le sens commun considèrent généralement que le lobbying consiste à chercher à influencer les décisions publiques. Seulement, pour définir le lobbying et la portée des règles, la loi Sapin 2 utilise tant l’objet que l’action en tant que telle : les entrées en communication avec les décideurs publics. Ce faisant la loi encadre finalement ce qui est le plus visible, le plus choquant pour l’opinion mais pas ce qui est peut-être le plus utilisé et le plus efficace aujourd’hui pour orienter les décisions publiques. À ce stade c’est peut-être un effet de mode ou une stratégie rhétorique et marketing pour contourner l’encadrement et l’image du lobbying mais celui-ci bascule vers « l’influence » ou les « affaires publiques ». Plutôt que d’entrer en contact directement avec les décideurs les représentants d’intérêts s’efforcent de plus en plus de les atteindre indirectement. Conséquence du développement de l’information en continu et de l’effacement des structures d’intermédiation au profit de l’individualisation de la politique, les stratégies d’influence s’appuient de plus en plus sur les médias pour convaincre ou créer une pression. Les relais intermédiaires sont en réalité bien plus larges que les médias. Associations, leaders d’opinion, chefs d’entreprise, universitaires sont par exemple des ressources fondamentales pour les groupes d’intérêt. Il s’agit de les convaincre pour qu’eux-mêmes diffusent indirectement et directement une opinion auprès des décideurs sur un sujet donné. Cette « influence à 360° » est désormais bien plus utilisée que le seul « lobbying institutionnel » pour peser sur les décisions publiques. Les cabinets et profils dits pure players, maîtrisant le droit, la politique et la stratégie, existent toujours mais ils sont maintenant minoritaires dans le paysage du lobbying composé de professionnels au profil hybride, à la fois stratèges des institutions et de la communication5. On devine ici que plutôt qu’une méconnaissance du travail de la représentation des intérêts, les trous dans la raquette sont plus liés à la difficulté technique à identifier et tracer les opérations d’influence et aux obstacles juridiques et politiques que cela pose. Il reste que si le but de l’encadrement du lobbying est de permettre de comprendre ce qui a guidé la décision et d’identifier ceux qui l’ont orientée pour en corriger les biais éventuels, alors rien ne permet d’affirmer que cette loi atteint son objectif, pire, quand elle n’est pas totalement nette, la transparence peut donner l’illusion du savoir et réduire l’attention.

Les effets concrets d’un dispositif symbolique

La liste des limites de l’encadrement du lobbying n’est pas exhaustive, on aurait pu également discuter la pertinence du rythme annuel des déclarations, le flou des éléments déclarés, l’incapacité à contrôler les informations communiquées ou encore la faiblesse des moyens de la HATVP. La capacité de la loi Sapin 2 à tracer l’empreinte normative effective du lobbying est si faible que cette réglementation entre sans peine dans la catégorie des « politiques symboliques »6 et autres montages d’ « apaisement ­symbolique »7 qui promettent plus qu’ils ne font. Ces dispositifs montrent que les autorités se préoccupent d’un problème plutôt qu’elles ne le résolvent matériellement. Ils peuvent être délibérément pensés comme tels ou être le résultat d’une incapacité matérielle à modifier une situation. Pour autant les politiques symboliques ne sont pas sans effets.

La diffusion des bonnes pratiques

Avant tout les politiques symboliques apportent une réponse à un problème public, elles sont un moyen de fournir une preuve que le problème a été entendu et considéré. Certes les experts seront conscients des limites des solutions mais ils ne sont pas les cibles de ces politiques. Celles-ci sont davantage destinées à transmettre un message à un public non averti composé de citoyens profanes et de journalistes généralistes. Néanmoins ces politiques sont très souvent annonciatrices d’approfondissements du dispositif. Les politiques symboliques sont un pied dans la porte. Les politiques symboliques sont des ressources stratégiques importantes pour ceux qui tentent de légitimer un problème car une fois une politique adoptée, symbolique ou non, il est extrêmement difficile de revenir en arrière 8. C’est d’autant plus le cas que les politiques symboliques sont souvent mentionnées avec force outils de communication à intervalles réguliers pour combler les défauts matériels des dispositifs. Ceux qui dénoncent les errements de l’encadrement du lobbying pourront obtenir des ajustements mais il ne sera plus possible pour eux de défendre un retour à l’absence de régulation. Le terrain est au contraire favorable à ceux qui souhaitent approfondir l’encadrement, par exemple Transparency International France. Puisque le problème est admis, à terme pour porter leur programme il leur suffira d’exploiter des événements contingents montrant les limites du dispositif.

Certains ont déjà pris des initiatives pour prolonger la loi. Par exemple la mairie de Bordeaux a mis en place son propre registre et système de déclaration des rendez-vous. De même, la mairie de Paris exige que l’exécutif publie sur un site dédié ses rendez-vous avec les lobbies dans le mois qui suit les rencontres. Pour répondre au naming / shaming qui naitra des différences locales et combler le fossé entre les lacunes manifestes de la loi et sa reconnaissance d’un problème, il est probable que l’on voit se multiplier des règles locales spécifiques dans la plupart des collectivités. La HATVP s’est d’ailleurs installée dans un rôle de coordination des référents déontologues des collectivités, comme elle l’expliquait dans son rapport d’activité de 2018. Les tenants de la transparence estiment que ces dispositifs, aussi imparfaits soient-ils, vont favoriser la responsabilisation des représentants d’intérêts et des décideurs publics par effet de sensibilisation au problème. C’est possible, mais les politiques symboliques, puisqu’elles agissent principalement sur les représentations, donc sur des éléments subjectifs, produisent des effets beaucoup plus difficiles à anticiper et à maîtriser que les politiques plus matérielles.

Un risque de délégitimation des ­décisions publiques

En apportant une réponse, les politiques symboliques donnent corps au problème, elles le légitiment. Il n’y a pas de solution à donner s’il n’y a pas de problème à résoudre ; si des dispositifs ont été adoptés c’est bien la preuve qu’il y avait un souci. Dès lors, l’adoption de politiques symboliques met un terme au débat sur la réalité du phénomène, laquelle ne fait pas toujours consensus à l’origine des débats. En quelque sorte les politiques symboliques contribuent à créer le problème. Ainsi, encadrer le lobbying local, c’est valider et diffuser l’idée selon laquelle l’empreinte normative des groupes d’intérêt est significative à cette échelle. Le risque ici est que l’échelon local, voit sa légitimité remise en cause à travers des accusations qui l’ont jusqu’à maintenant plutôt épargné à la différence du niveau national auquel on associe plus naturellement le lobbying. Ces accusations sembleront d’autant plus valables que les failles du système sont évidentes et qu’il est aisé de propager des raisonnements fondés sur la « pensée magique » et difficile de démontrer les erreurs de celle-ci. La pensée magique, ou synchronicité en psychologie, c’est considérer qu’un phénomène est le résultat d’un autre, sans preuve, simplement par association d’idées ou simultanéité. Ici la pensée magique consiste à établir une causalité instinctive entre l’intervention d’un représentant d’intérêt à propos d’une décision publique et son contenu alors que rien ne démontre que l’influence a été effective9. Pour le décideur démontrer que son choix résulte de son libre arbitre est quasi-impossible s’il va dans le même sens que l’intérêt du lobbyiste.

Les adversaires de la décision ou du décideur pourront jouer cette carte en invoquant les éléments matériels contenus dans le registre faisant état d’une interaction entre le décideur et le représentant d’intérêt. Il risque de toujours exister un soupçon
d’illégitimité autour de la décision.

Le risque du risque est d’abord que les décideurs décident d’entrer en interaction uniquement avec des intérêts qui sont universellement considérés comme légitimes a priori, au détriment de problèmes et de solutions moins évidents mais parfois plus pertinents. En outre, et paradoxalement, le risque de pensée magique et de délégitimation qui y est associé pourrait inciter les décideurs à amplifier l’opacité de certaines interactions.

Par conséquent, il n’est pas certain que l’encadrement du lobbying territorial préserve la légitimité des institutions et décisions publiques locales, sans vigilance et un effort accru d’explication des décisions l’effet pourrait même être inverse.

Sébastien Guigner

1 Guigner S., « Lobbying territorial », dans Pasquier R., Cole A. Guigner S. (dir.), Dictionnaire des politiques territoriales, Presses de Sciences Po, 2020.

2 « 25 propositions soumises au débat public pour un lobbying plus responsable et transparent », pré-rapport présenté par M. Sylvain Waserman, Vice-président de l’Assemblée nationale, Président de la délégation chargée des représentants d’intérêts et des groupes d’études, janvier 2020.

3 Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

4 Pierson P., « Path Dependence, Increasing Returns and The Study of Politics », American Political Science Review, 94 (2), 2000.

5 De Fortanier D., « L’influence, nouvel eldorado du lobbying », Contexte, 4 janvier 2023.

6 Edelman M., Political language: Words That Succeed and Policies That Fail, Academic Press, 1977.

7 Cobb R. W., Ross M. H. (ed.), Cultural Strategies of Agenda Denial: Avoidance, Attack, and Redefinition, University Press of Kansas, 1997.

8 Pierson P., op. cit., 2000.

9 Courty G., Le lobbying en France: Invention et normalisation d’une pratique politique, Peter Lang, 2002.